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13 mai 2014 2 13 /05 /mai /2014 14:49

J'ai bien aimé lire Flora des Embruns, il s'agit d'un drame psychologique  :


" Vingt ans après avoir largué les amarres en plein drame, Vinoc, ancien patron de pêche, remet sac à terre quelque part dans port de Bigouden. Avec une idée seule en tête : se venger... Dans le passé, la belle Flora l'aurait trompé."


facile et rapide à lire, avec uniquement 158 pages, pour ce livre qui a été imprimé en 2012. L'auteur reconnu dès ses débuts comme l'un des maîtres du roman noir français, Hervé Jaouen excelle aussi dans l'évocation de sa Bretagne natale ou de l'Irlande, son pays d'adoption.  

flora des embruns

 

Résumé du livre

Dans le passé, la belle Flora, serveuse au café des Embruns, aurait trompé son mari, jeune et brillant patron pêcheur, tragiquement disparu peu après. Un drame que nul n'a oublié. Flora moins que personne, qui chaque jour va prier Notre-Dame des Péris-en-mer, pour que s'exauce son voeu : « Qu'il ne revienne jamais ! »
Les années ont passé. Un marin danois, Hans Rosen, surgi de nulle part épie Flora depuis la chambre d'hôtel qu'il a réservée, en face du café des Embruns...

 

Extrait Chapitre 1

 

Débarqué du train de Paris à la gare du chef-lieu, l'homme avait cherché en vain la correspondance sur le panneau des départs. Il s'était renseigné. L'employée l'avait regardé avec des yeux ronds.

- Mais cette ligne a été supprimée il y a plus de quinze ans. On n'assure plus la correspondance. Il faut prendre le car, une compagnie privée. 

- A quelle heure ?

- ça je n'en sais rien .

Mi-intriguée, mi-méprisante, elle lui a indiqué l'adresse de l'arrêt des cars.

- Je crois qu'il y en a un dans la soirée...

Il ne l'a pas remerciée. Il lui a tourné le dos, indifférent. N'eût été son hébétude, il aurait vu dans les yeux de la guichetière, sur fond de dégoût et de crainte mêlés, le portrait d'un type usé : un corps sec, épaules voûtées dans la veste de toile beige d'une taille trop petite - une vieille veste de chasse payée cinq livres dans un rebut anglais -, des mains noueuses, calleuses, de vraies serres, un visage émacié, une barbe de quinze jours sous laquelle la peau était grenue, irritée, des rides creusées, presque bleues, comme teintes au plus profond par le tanin d'un air acide et noir, des cheveux raides comme de la paille sèche, gris clairsemés - une chevelure d'épouvantail -, et des yeux brillants et délavés où trempaient, chauffés à blanc, les couteaux de la haine.

Couteau.

La lame du couteau, dans sa poche droite, était tiède. A son contact, il a trouvé un semblant de conscience.

Il a trainé son sac jusqu'à la gare routière, a pris un billet en prononçant un seul mot - le nom du port -, est descendu au Moulin du Pont. Pour lui cela avait été un mouvement ininterrompu et bref, alors qu'il était resté cloué deux heures et demie sur un banc public et que le trajet, ponctué de nombreux arrêts, avait duré une heure un quart.

Il a marché en direction du port, insensible aux gens, aux facades clinquantes, aux cafés rebaptisés de nom anglo-saxons : Easy Bar, Six O'Clock, Big Ben, Twenty, Scottish...

Une tempête d'été venait de se lever, la bruine poissait les vêtements, les voitures, les vitrines, les toits dont les tuiles faîtières dégoulinaient de fientes de goélands. Plus hardis que jadis, les oiseaux arpentaient les quais de la criée, s'écartant à peine au passage des chariots. La vente du soir - vente de la pêche des côtiers, celle des hauturiers ayant lieu à l'aube - se terminait. Indésirables, les touristes en K-way étaient maintenus à distance par une chaîne.

L'homme a contourné le bâtiment.

Craignant confusément que le rendez-vous écrit sur le sable de sa mémoire ne soit irréel, il a d'abord regardé l'horizon, la brosse penchée des pins insignis à la pointe de Men Brial, l'abri du bateau de sauvetage, le liséré clair de la plage, plus près les tripodes de béton qui protégeaient le port des lames de noroît, puis à quelques pas le bout du quai de la criée et, enfin, flanqué de hautes cheminées, pignons couronnés de briquettes rouges, le café des Embruns tel qu'il l'avait laissé, vingt ans auparavant. 

 


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